Partie 1 : Un peu de biologie

Comprendre la génétique et comment se transmettent et se développent certaines maladies nécessite d’avoir quelques notions de biologie. Voici un résumé des connaissances de base qui vont vous aider à mieux comprendre le lien entre l’être humain, la génétique et l’hérédité.

1 – Les concepts clés

1.1 – Les cellules

Le corps humain est constitué d’environ 70000 milliards de cellules. Il existe de l’ordre de 250 types de cellule qui ont des fonctions différentes : on peut citer par exemple les cellules de la peau, les cellules intestinales, les globules rouges, les cellules des muscles, les neurones (cellules d’intérêt dans le cas du syndrome d’Angelman mais nous y reviendrons plus tard)…

Les cellules

Vue schématique d’une cellule avec son noyau au centre

La cellule est l’unité de base du vivant :

  • 20 milliards de cellules meurent chaque jour
  • 20 millions se divisent en deux chaque seconde

Toutes les cellules du corps, sauf les globules rouges et les plaquettes de sang, contiennent un noyau qui renferme toute notre information génétique.

1.2 – Les chromosomes

L’information génétique est contenue dans nos 23 paires de chromosomes :

  • 22 paires dites « autosomes » (communes aux hommes et aux femmes)
  • et une paire sexuelle : X-X pour les femmes, X-Y pour les hommes.

Chaque paire est constituée d’un chromosome issu de la mère et d’un autre du père.

23 paires de chromosomes

1.3 – L’ADN

Nos 23 paires de chromosomes contiennent eux-mêmes notre ADN : ce filament  est en forme de double hélice.

La molécule d’ADN, également connue sous le nom d’acide désoxyribonucléique, se trouve dans toutes nos cellules. C’est le « plan détaillé » de notre organisme aussi appelé « code génétique » : il contient toutes les informations nécessaires au développement et au fonctionnement du corps. L’ADN est composé de quatre éléments complémentaires, appelés les nucléotides qui sont : l’adénine, la thymine, la guanine et la cytosine (ou A, T, G, C)

ADN en double hélice et les bases complémentaires

1.4 – Les gènes et allèles

— Gène —

L’ADN porte les gènes. Un gène est donc une fraction de l’ADN.

ADN et Gène

L’espèce humaine possède environ 20 000 gènes : c’est le génome.
Les gènes indiquent à chaque cellule son rôle dans l’organisme. A partir de l’information qu’ils contiennent, les cellules synthétisent des protéines indispensables à la vie : c’est la traduction du code génétique. Le fonctionnement de notre corps repose sur ces dizaines de milliers de protéines. Chacune a un rôle différent à jouer dans notre organisme. Par exemple :

  • l’hémoglobine est la protéine qui sert à transporter l’oxygène dans le sang ;
  • les anticorps protègent l’organisme des corps étrangers ;
  • d’autres protéines encore interviennent pour définir la couleur des yeux ou la forme du visage, etc.

— Allèle —

Le gène est une très petite portion de chromosome. Comme les chromosomes, chaque gène est présent en double dans nos cellules. Ces deux copies d’un même gène, appelées allèles, sont le plus souvent différentes : une d’origine paternelle et une d’origine maternelle. Vous pouvez penser au gène codant pour la couleur de vos yeux avec deux allèles : l’allèle marron hérité de votre père et l’allèle bleu hérité de votre mère.

1.5 – ARN et traduction en protéines

La fabrication des protéines n’est pas fabriquée directement à partir des plans originaux (ADN) mais à partir d’une copie ARNm pour Acide RiboNucléique messager qui a une structure très proche de l’ADN.  L’ARN est formé d’une seule chaîne hélicoïdale de structure analogue à l’une des 2 chaînes qui constituent l’ADN. Cette étape s’appelle la retranscription de l’ADN en ARN et se fait au sein du noyau de la cellule.

La synthèse des protéines s’effectue dans le cytoplasme de la cellule, à partir de l’ARN messager. Elle nécessite la présence d’un lecteur – le ribosome de la cellule – et d’un traducteur – l’ARN de transfert. Le complexe formé par ces deux entités parcourt l’ARN messager par triplet et fabrique progressivement une chaîne d’acides aminés qui va former la protéine.
La vidéo suivante permet de revenir sur la retranscription de l’ADN en ARN puis de sa traduction en protéine :

Une anomalie génétique (mutation ou anomalie chromosomique) peut perturber la fabrication des protéines. Elle donne en quelque sorte de « mauvais ordres » pour les fabriquer avec pour conséquence : une absence de fabrication, un excès de fabrication ou une fabrication anormale. La protéine ne peut plus jouer son rôle, ce qui engendre une maladie génétique.

Une anomalie génétique n’aboutit pas toujours à une maladie. Certaines erreurs de fabrication peuvent passer totalement inaperçues ou ne s’exprimer qu’en fonction de l’environnement. En effet, l’environnement joue un rôle dans l’expression des gènes.

Attention, nous ne sommes pas « tout génétique » !
Dans certains cas, le rôle des gènes est déterminant dans le risque de développer une maladie génétique. Pour d’autres, les facteurs environnementaux (alimentation, tabac, mode de vie, etc.) jouent un rôle plus ou moins important, diminuant parfois le poids de la part du patrimoine génétique.

2 – Focus sur le syndrome d’Angelman

2.1 – Les neurones

Le syndrome d’Angelman est une maladie qui affecte les cellules des neurones. Le neurone est une cellule hyperspécialisée pour recevoir, intégrer et transmettre de l’information.

Les neurones ne se renouvellent pas ou très peu.

Grâce à leur nombreux prolongements, les neurones sont connectés entre eux formant véritablement un réseau de « câbles » qui s’étendent dans tout le corps (les nerfs)

Le cerveau est composé de près de 100 milliards de neurones

2.2 – Le chromosome 15 et le gène UBE3A

Le syndrome d’Angelman est dû à une anomalie génétique localisée sur le chromosome 15 et plus précisément dans la région 15q11-q13 qui contient le gène UBE3A.

Retour sur le phénomène d’empreinte

Le plus souvent, les deux exemplaires d’un gène permettent la production de protéines (ils sont fonctionnels, on dit qu’ils « s’expriment »). Mais, pour certains gènes, il arrive que seul l’un des deux exemplaires, selon qu’il vient du père ou de la mère, soit « autorisé » à être fonctionnel, l’autre reste « silencieux » (l’exemplaire de ce gène ne permet pas ou très peu la production de protéine). C’est ce qui se passe dans le syndrome d’Angelman où la copie paternelle du gène UBE3A est silencieuse dans les neurones à travers le transcrit antisens UBE3A-ATS et malheureusement la copie maternelle est dysfonctionnelle.

Le phénomène d’empreinte sur le gène UBE3A

2.3 – La protéine Ubiquitine ligase E6AP

La protéine issue du gène Ube3A est une « enzyme ubiquitine (Ub)-ligase E6AP » qui peut marquer les protéines cellulaires avec une molécule « marqueur » appelée ubiquitine, soit pour modifier l’activité des protéines ciblées, soit pour provoquer leur destruction par un mécanisme de « poubelle cellulaire ». Cette protéine est essentielle au bon fonctionnement de notre organisme. Il demeure encore de la recherche fondamentale pour comprendre toutes les interactions que peut avoir cette protéine.

Une petite vidéo réalisée pour expliquer à un enfant ce qu’est le syndrome d’Angelman ; elle revient de manière imagée sur un certain nombre de concepts évoqués ci-dessus.

Les termes cellules, chromosomes, ADN, gène, ARN, vous sont désormais familiers. Vous êtes maintenant armés pour passer à la partie suivante sur ce que sont les thérapies géniques.